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Savoir pour Pouvoir Agir.
26 mai 2019

Un refuge pour les tortues marines ouvre ses portes à Monaco.

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Tout a commencé en 2014, quand une minuscule tortue caouanne est récupérée par un marin dans le port de Monaco.

Posée dans le creux de la main, elle ne pèse que quelques grammes. Affaiblie, ses chances de survie sont alors très faibles. Elle est donc confiée au Musée océanographique de Monaco, où elle est soignée, bichonnée et baptisée du nom de sa marraine Rana. Plusieurs mois de soins intensifs permettent de la remettre d’aplomb.

Mais, comme pour tous les enfants, arrive le moment où il faut quitter le nid. Équipée d’une balise GPS, Rana est relâchée en Méditerranée en juin 2018.

Pendant près de trois mois, l’Institut suit ses moindres faits et gestes. « Elle parcourait près de 30 km par jour en moyenne, raconte Olivier Dufourneaud, directeur de la politique des océans à l’Institut océanographique. Elle est allée jusqu’au sud de l’Espagne ! Et puis on a malheureusement perdu sa trace. » Le signal GPS s’est tu : batteries épuisées, mauvaise rencontre… « Une fois à l’âge adulte, les tortues n’ont quasiment pas de prédateur, explique Corinne Bussi-Copin, chargée de mission pour la politique des océans. Dans l’hypothèse où Rana serait morte, le plus crédible est d’y voir l’œuvre d’une hélice de bateau ou d’un filet de pêche abandonné. »

De cette expérience naît l’idée d’organiser un accueil pérenne avec l’ouverture le 27 avril dernier du Centre monégasque de soins des espèces marines, en collaboration notamment avec le Réseau des tortues marines de Méditerranée française (RTMMF). Les animaux sont recueillis dans des bassins de soin et y restent jusqu’à ce que leur état autorise un retour en mer. Tous les usagers de la mer sont invités à alerter le centre s’ils voient un animal en détresse.

Comme Rana, de nombreuses tortues caouannes peuplent la Méditerranée. Mais «  c’est quasi impossible de connaître leur nombre, explique Corinne Bussi-Copin. Les tortues voyagent beaucoup. Et on retrouve des caouannes quasiment dans toutes les mers tropicales et tempérées. L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) estime seulement le nombre de femelles reproductrices à environ 60 000.  » En tout, sept espèces de tortues peuplent les océans du globe, avec, toujours selon l’UICN, quelque 1 120 000 femelles pondeuses. Deux espèces sont particulièrement installées en Méditerranée, les caouannes et les tortues vertes. « On peut aussi croiser quelques tortues luths, ajoute Corinne Bussi-Copin. Mais aucun site de ponte n’est connu. »

Pour toutes ces tortues, la vie est un parcours du combattant qui commence par une sélection drastique. Pour mille naissances, on estime qu’une seule tortue arrivera à l’âge adulte. Les femelles viennent pondre sur les plages une fois le soleil couché. Après une soixantaine de jours, les œufs éclosent et des centaines de bébés tortues partent à l’assaut de la mer. Sans protection, ils sont à la merci des oiseaux et autres prédateurs pour qui ils représentent un véritable festin.

En Méditerranée, les pontes ont lieu majoritairement du côté oriental. « L’urbanisation des côtes espagnoles, françaises et italiennes a sans doute chassé les femelles, explique Corinne Bussi-Copin. Pour autant, on remarque que certaines femelles reviennent de ce côté du bassin. Il y a quelques années, en Corse, une femelle était venue pour pondre ses œufs. Elle a été surprise par des touristes qui, pensant qu’elle était échouée, l’ont remise à l’eau. »

Le changement climatique joue sur ces lieux de ponte. Le sexe des tortues est en effet défini par la température durant l’incubation. Afin de maintenir un équilibre entre mâles et femelles, les pontes doivent se faire sur des plages ni trop chaudes ni trop froides. « Les études scientifiques nous disent qu’il n’y a pas d’inquiétude de voir un trop grand déséquilibre se créer, explique Corinne Bussi-Copin. Les tortues ont survécu à d’autres changements climatiques, elles savent s’adapter et changer leurs lieux de ponte. Mais pour ça, il leur faut des plages disponibles… et c’est bien là le problème. »

L’urbanisation des côtes est le premier danger pour les tortues marines, il les met en péril avant même l’éclosion des œufs en limitant les lieux de reproduction. Mais c’est loin d’être le seul. « Les tortues restent très vulnérables avant qu’elles atteignent leur taille adulte, explique Olivier Brunel, chef du service aquarium au Musée océanographique. C’est d’autant plus préjudiciable que leur maturité sexuelle arrive assez tard. Pour qu’une tortue puisse se reproduire, il faut qu’elle vive au moins 15 ou 20 ans. » Adulte, les tortues ne sont pas à l’abri pour autant. Si elles sont admirées pour leur longévité, chacune des espèces est aujourd’hui menacée. La consommation de leur viande a longtemps contribué à leur déclin, mais le durcissement de la législation permet désormais d’en limiter l’impact. Aujourd’hui, les principaux dangers sont la pollution plastique, la pêche accidentelle et les hélices de bateaux. Des maux auxquels le Centre monégasque de soins des espèces marines s’efforce désormais de remédier.

 

Les tortues convalescentes reprendront leurs forces dans un bassin accessible aux visiteurs et profiteront d’une incroyable vue sur la mer.

 

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Le bâtiment est plus que centenaire, il est pourtant d’une incroyable modernité. Inauguré en 1910 par le prince Albert-Ier, le Musée océanographique continue sa mission auprès du plus grand nombre. En 2019, il s’étend pour la première fois depuis sa création avec l’Odyssée des tortues.

Ce nouvel espace en plein air, surplombant la mer, propose un parcours de visite et de sensibilisation et abrite le Centre monégasque de soins des espèces marines (CMSEM). Ce dernier permet la prise en charge de tortues malades ou blessées, signalées par les usagers de la mer. Le centre pourra aussi traiter d’autres espèces telles que les hippocampes et les grandes nacres.

Le site vient tout juste d’être ouvert mais l’emplacement est chargé d’histoire. C’est à l’occasion des travaux d’aménagement du nouvel espace qu’une fouille préventive a mis au jour des vestiges de remparts moyenâgeux ainsi qu’une ancienne galerie.

Ce sont à présent 550 m2 qui sont dédiés aux animaux mal en point. Après avoir admiré les habitants des fonds marins qu’abrite l’aquarium, les visiteurs arrivent à une terrasse perchée sur une falaise. L’occasion de s’arrêter cinq minutes pour contempler la mer après avoir découvert ses occupants. La visite se poursuit et débouche au niveau de la cuisine, entièrement vitrée. Les visiteurs du matin pourront y observer les soigneurs préparant les repas du jour pour les 6 000 à 10 000 bouches à nourrir. Au menu : poissons et crustacés qui sont préparés en fonction des besoins de chaque espèce. L’occasion d’en apprendre davantage sur le mode d’alimentation des tortues - mais aussi sur leur cycle de vie - ou encore sur les menaces qui pèsent sur ces espèces, grâce aux panneaux pédagogiques qui jalonnent le parcours de visite.

Une proximité unique  

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Quelques mètres plus bas, le bassin de réhabilitation de 160 m3 accueille pour l’heure deux tortues. Elles sont nées au Marineland en 2011. Placées quelques mois dans un lagon clos du cap d’Antibes dans le cadre du programme Caretta, elles n’ont pas été estimées aptes à vivre en milieu naturel. Leur instinct de chasse n’est pas suffisamment développé pour leur garantir une chance de survie. Une vitre de 21 cm d’épaisseur sépare le visiteur de ce monde marin. Un sentiment de proximité unique et incroyable. Le visiteur est comme immergé dans l’eau à côté des pensionnaires.

À l’écart du public, le centre de soins est quant à lui composé de cinq bassins à disposition des animaux les plus mal en point. Habilités à les manipuler, les soigneurs interviennent en collaboration avec des vétérinaires spécialisés et les réseaux français et italien des centres de soins. C’est ici que les animaux seront littéralement réparés de leurs blessures. Les plus fréquentes résultent des prises accidentelles dans un filet, d’une ingestion de plastique ou d’hameçon, ou bien des collisions avec les bateaux qui abîment leur carapace. Analyse de sang, échographie et même radios (qui elles seront faites en clinique vétérinaire), rien n’est laissé au hasard pour assurer un prompt rétablissement aux tortues. Une fois remises, elles rejoindront le bassin de réhabilitation avant de retrouver la mer.

Mais la visite n’est pas terminée. Après avoir admiré les poissons du monde entier dans l’aquarium, il est conseillé de monter dans les étages. Un fil rouge sur les tortues guidera le visiteur jusqu’à la fin de l’année : une exposition temporaire retraçant la grande aventure des tortues marines, de leurs origines à nos jours, un livret-jeu en dix missions permettant aux 6-12 ans d’être sensibilisé à leur cause, enfin, une linogravure au format XXL de l’artiste Alick Tipoti, originaire du détroit de Torrès, investit le toit-terrasse. Un parcours muséal mêlant collections scientifiques et d’histoire naturelle, art et dispositifs vidéo qui retrace l’incroyable évolution de cet animal, des origines à nos jours. Dans les traces de leurs ancêtres, les sept espèces de tortues marines actuelles nous révèlent une partie de leurs secrets, mais nous font également prendre conscience de leur condition devenue fragile.

 

Des missions de protection partout dans le monde.

Pour protéger les tortues de mer, l’Institut océanographique de Monaco participe à de nombreux projets hors du bassin Méditerranéen. Dans le cadre des « Explorations de Monaco », et en collaboration avec le CNRS et l’Ifremer, il s’est associé au projet « Next », qui vise à développer des outils pour améliorer la gestion des tortues marines.

Fin 2018, des chercheurs ont équipé une quarantaine de tortues vertes de Martinique de nouvelles balises de haute technologie. Des sacs à dos GPS dotés de caméra qui permettent d’étudier la distribution, les déplacements et les comportements de plongée de ces animaux. Elles ont déjà fourni plus de 30 heures d’images.

« Ce type d’information est très important, car on connaît toujours très mal le comportement des tortues, explique Corinne Bussi-Copin, chargée de mission pour la politique des océans à l’Institut océanographique. Ce type d’initiative permet de nous renseigner sur la santé des individus observés, de brosser un état des lieux des menaces, mais aussi de suivre l’évolution des populations. » Les tortues sont des supermigrateurs qui voyagent sur des distances incroyablement longues, même si elles reviennent pondre inlassablement sur les mêmes plages.

Processus mystérieux...

Ce processus migratoire reste en grande partie mystérieux. En voyageant, les tortues sortent des zones protégées et s’exposent donc à des dangers, comme le braconnage, les collisions, etc. Mieux comprendre ces trajectoires permettra d’adapter les politiques de protection futures.

Le projet « Next » n’est pas le seul programme dans lequel Monaco s’investit. La Fondation Prince Albert II de Monaco est impliquée au Costa Rica, au Mozambique, ou encore en Polynésie française. À chaque fois, l’objectif est de lier recherche scientifique et actions de conservation. En République démocratique du Congo, un projet propose aux pêcheurs de relâcher les tortues prises dans leur filet en échange du matériel nécessaire à leur réparation.

Ces missions s’accompagnent aussi d’un objectif pédagogique envers les touristes, qui peuvent visiter les lieux de reproduction des tortues, mais aussi des enfants, en organisant des échanges dans les écoles.

 

Robert Calcagno, directeur général de l’Institut océanographique, Fondation Albert-Ier, prince de Monaco, a accordé une interview au Figaro (24/05/2019).

Pourquoi ouvrir ce dispensaire pour tortues marines ?

C’est une démarche qui s’inscrit dans la continuité de la mission de médiation que se donne l’Institut depuis sa fondation par le Prince Albert Ier de Monaco en 1910. Après de nombreux voyages, il a pris conscience de la fragilité et de la richesse de l’océan et donc de l’importance de le protéger. L’Institut océanographique a pour mission de sensibiliser les visiteurs, qui viennent de nombreux pays, aux enjeux de l’environnement. De la disparition des espèces à la surexploitation, en passant par le réchauffement climatique. La situation des tortues est extrêmement préoccupante. On ne peut pas se contenter d’en avertir le public. Avec nos humbles moyens, nous essaierons de venir concrètement en aide à ces animaux menacés.

Il s’agit d’une démarche particulièrement volontaire, presque d’un acte militant. 

Nous nous donnons pour objectif de travailler tous les jours pour une humanité meilleure, c’est vrai. Nous voulons transmettre la vérité avec une vision à long terme. La situation de la nature est préoccupante. Et dans ce contexte, la place de l’océan est prépondérante. Il régule le climat, abrite une biodiversité incroyable. Notre but est de réussir à identifier les problèmes les uns après les autres, sans catastrophisme. À chaque fois, on regarde ce qu’on peut faire. À la fois en tant qu’institution, mais aussi à titre individuel. Nous avons un devoir d’exemplarité pour les générations futures.

Et pourquoi spécifiquement les tortues ? 

Ce dispensaire ne sera pas ouvert qu’aux tortues, il appuiera aussi d’autres projets du gouvernement monégasque et de la Fondation Prince Albert II en faveur des grandes nacres et des hippocampes, par exemple. Cela dit, les tortues sont pour nous des animaux particulièrement importants. Elles ont côtoyé les dinosaures et ont survécu à la dernière grande crise d’extinction des espèces, il y a 65 millions d’années. Nous ouvrons d’ailleurs dans le même temps une exposition temporaire pour raconter l’histoire des an­cêtres de ces animaux. Nous présentons un magnifique fossile, vieux de plusieurs dizaines de millions d’années, d’une tortue de deux mètres de long, l’archelon ! Nous pensons qu’en faisant connaître cette histoire nous convaincrons nos visiteurs qu’il est essentiel de tout faire pour que ces animaux survivent, et plus largement que l’on enraye l’écroulement actuel de la biodiversité. Les tortues sont des animaux symboliques, emblématiques. Les enfants y sont très attachés. Mais ce sont aussi des animaux très mystérieux, car finalement on ne connaît pas grand-chose d’elles.

Votre mission ne s’arrête donc pas à l’enceinte de votre institut ?

Non et heureusement ! Car pour montrer ce que l’on a à montrer, on n’a jamais assez de place. Nous travaillons beaucoup avec les écoles pour sensibiliser les plus jeunes. Une tortue adulte a très peu de prédateurs en dehors des requins et des orques. Son principal ennemi, c’est donc l’activité humaine avec la pêche, les hélices des bateaux et la pollution. Nous formons les professionnels de la mer aux bons gestes à pratiquer s’ils trouvent une tortue blessée ou bien s’ils en remontent une dans leurs filets. Ensuite, avec le gouvernement monégasque, on travaille sur une législation plus favorable à la biodiversité. Les plastiques non réutilisables sont interdits en Principauté. Nous souhaitons aussi promouvoir des alternatives aux lâchers de ballons de baudruche. Gonflés à l’hélium, ils s’envolent, disparaissent dans le ciel et amusent les enfants. En altitude ces ballons éclatent et les morceaux retombent soit en mer, soit sur terre. Dans l’eau, les tortues les confondent avec les méduses… Une récente étude a montré qu’un tiers des tortues échouées en Australie présentaient des débris de ces ballons dans leur tube digestif. Les ballons biodégradables ne sont pas plus une solution, ils mettent quatre à cinq ans à disparaître. Notre mission est donc de faire de la pédagogie. Il ne s’agit pas de dire « il faut arrêter de s’amuser ». Nous devons juste expliquer les conséquences de chacun de nos actes et trouver des alternatives ludiques plus durables. Nous avons installé, au sein de l’aquarium, un bassin rempli de déchets, réalisé par l’artiste Philippe Pasqua, qui permet d’alerter nos visiteurs sur cette pollution invisible depuis la Terre.

Vous dédiez une salle entière à l’histoire de l’Institut et aux expéditions de son fondateur, le prince Albert Ier. Cette histoire est particulièrement importante pour vous ? 

Oui, bien sûr. Comme je vous l’expliquais, le prince Albert Ier était un visionnaire. En 1921, déjà, il prononçait un discours à l’Académie nationale des sciences de Washington qui introduisait l’idée d’une limite à l’exploitation des océans. Ce besoin d’alerter nos contemporains est donc dans l’ADN de notre institut. Nous avons choisi de raconter l’histoire de cette prise de conscience, mais nous ne nous contentons pas d’un regard vers le passé. Dans la même salle, sur la mezzanine, plusieurs modules retracent les grands enjeux de ce XXe siècle : les aires marines protégées, la pollution plastique, le changement climatique, la surpêche ou encore la haute mer. Le visiteur est d’ailleurs accueilli par SAS le prince Albert II, sur écran transparent, qui livre sa vision de la protection de l’océan. Son trisaïeul avait compris le rôle crucial des océans et de la biodiversité mais ne connaissait pas encore les dangers du réchauffement. Cela fait plus de quatorze ans que le prince souverain travaille avec nous et sa fondation pour sensibiliser l’opinion mondiale à cette question. Nous essayons donc de lier l’actualité avec notre propre histoire. C’est un combat permanent que nous menons d’arrache-pied. On remarque que les choses progressent. Les gens prennent de plus en plus conscience du rôle des océans et comprennent qu’il ne s’agit pas d’une ressource illimitée et inépuisable.

 ⁂

ⓘ Infos pratiques

L’Institut océanographique est une fondation reconnue d’utilité publique, qui fédère les acteurs scientifiques, politiques, économiques et le grand public pour faire connaître et protéger l’océan. Porteur de nombreux projets sur la scène nationale et internationale (colloques, expositions, programmes pédagogiques…), l’Institut poursuit sa mission de médiation environnementale et s’appuie sur les deux établissements que sont le Musée océanographique de Monaco et la Maison des océans à Paris.

Musée océanographique de Monaco

Avenue Saint-Martin MC 98000 Monaco.

Tél. : +377 93 15 36 00. Email : musee@oceano.org

Site :

Musée océanographique de Monaco - Aquariums, collections, expositions, jeux et détente

Aquariums, expositions, jeux et détente, le Musée océanographique de Monaco vous ouvre les portes du monde marin. Des aquariums aux collections d'Histoire Naturelle

https://www.oceano.mc


www.oceano.org

Ouvert tous les jours (sauf le week-end du Grand Prix de Formule 1 et le 25 décembre).

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